Préparer le dirigeant d'entreprise à son audition dans le cadre d'une enquête pénale

« Le dirigeant a mis très longtemps à regarder en face le risque pénal. Au fil du temps il a perçu l’importance de faire appel aux compétences pénales de son avocat et il a même réussi à admettre qu’être assisté au cours de la confrontation avec l’enquêteur n’est pas un signe extérieur de culpabilité. Dans cette phase d’enquête, si particulière parce qu’à la fois coercitive et non contradictoire, , qu’attend le dirigeant de son avocat et que peut faire l’avocat pour son client dirigeant ? »

Il y a encore peu de temps, le risque pénal était totalement méconnu des chefs d’entreprise.

L’une des raisons principales en est certainement que, pendant longtemps, les entrepreneurs ont détourné leur regard de ce risque spécifique, de crainte de le découvrir tellement envahissant et effrayant qu’il les paralyserait dans toute initiative économique. C’est que la liste est longue des affres dans lesquelles nous propulse le mot « pénal », et particulièrement quand il s’applique à l’entreprise.

D’abord, les contours du domaine pénal sont difficilement déterminables. Les infractions qui pèsent sur les entreprises et leurs dirigeants sont très nombreuses et mal identifiées parce que disséminées dans plus de 80 codes. Elles peuvent donc souvent être commises sans même que leur auteur n’en ait eu conscience et la protection que devrait apporter la nécessité pour le juge de caractériser l’élément intentionnel est quasiment inopérante. Le plus souvent cet élément constitutif est en effet déduit du seul statut de dirigeant désigné comme « un responsable entouré de responsables » ne pouvant donc ignorer « l’obligation clairement édictée par la loi », ce qui dans nombre de cas est une pure fiction.

Ensuite, le domaine pénal est le domaine de la peine. Or, au-delà même des peines principales déjà anxiogènes (emprisonnement pour les personnes physiques et amendes dont le quantum encouru par les personnes physiques est multiplié par cinq pour les personnes morales) certaines peines complémentaires peuvent avoir des conséquences plus lourdes encore comme l’interdiction de gérer pour un dirigeant, ou l’exclusion des marchés publics pour une entreprise.

Indépendamment même de la peine, la seule mention au casier judiciaire du dirigeant et/ou de la personne morale peut handicaper le développement de l’un comme de l’autre en interne comme à l’international.

Évoquons encore l’impact de la machinerie pénale sur la réputation de l’entreprise et des dirigeants qui risque d’être longtemps entachée : on sait qu’une interpellation ou une garde à vue qui tourne en boucle pendant quelques dizaines d’heures sur les canaux de communication (réseaux sociaux, chaines d’information en continu, …) sera difficilement effacée par l’annonce discrète un ou deux ans plus tard d’une décision de mise hors de cause.

Et si l’on ajoute enfin à cette liste anxiogène la réparation du préjudice causé par la faute pénale qui sera à la charge du dirigeant s’il est reconnu coupable d’une infraction pénale intentionnelle, séparable comme telle de ses fonctions sociales, engageant ainsi sa propre responsabilité civile à l’égard des tiers à qui cette faute a porté préjudice, il faut bien reconnaître que le risque pénal donne le vertige.

L’on comprend alors que d’aucuns, attachés tant à la sérénité des quelques heures de sommeil qu’ils s’accordent qu’au dynamisme de leur outil, soient tentés de regarder partout ailleurs que vers cette réalité.

Pourtant, les conséquences que nous venons rapidement d’énumérer sont tellement significatives qu’il apparaît désormais inconsidéré de ne pas intégrer ce risque dans une bonne gestion de l’entreprise.

cliquer sur ce lien pour lire la suite de l’article

Publié le 17 décembre 2020.